Par :Villardouin CERSINE journaliste d'investigation.
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L'affaire foncière qui déchire la communauté de Prévoyance, à Savane-au-Lait, atteint un nouveau sommet de tension alors que les paysans, descendants de ceux qui ont cultivé ces terres depuis 1937, récusent en bloc la cour d'appel du Cap-Haïtien, accusant des juges d'être compromis par un passé trouble de corruption et de collusion avec les prétendus acheteurs des terres ; cette action audacieuse, menée par l'avocat des paysans, Me Justafort Mompremier, met en lumière les profondes failles d'un système judiciaire haïtien miné par le manque de confiance et les accusations de partialité, tout en ravivant le douloureux souvenir de l'expulsion brutale de ces mêmes paysans en 2014, un acte qui reste gravé dans les mémoires comme une violation flagrante de leurs droits et de leur héritage ; l'issue de cette récusation, désormais entre les mains de la Cour de cassation, déterminera non seulement l'avenir de ces familles paysannes, mais aussi la crédibilité de la justice haïtienne dans sa capacité à protéger les plus vulnérables face aux intérêts économiques puissants et aux manœuvres juridiques opaques.
CAP-HAÏTIEN,Nord, ce jeudi 26 juin 2025----Un litige foncier de longue date qui oppose des paysans de Prévoyance (Savane-au-Lait) à un groupe d'individus revendiquant la propriété des terres a connu un nouveau rebondissement dramatique ce mardi, alors que les avocats des paysans ont récusé l'intégralité de la cour d'appel du Cap-Haïtien.
L'audience, qui devait examiner le dossier de conflit foncier, a été abruptement suspendue en raison de cette action de défiance envers les magistrats. Me Justafort Mompremier, avocat des paysans, a justifié cette récusation en invoquant un manque de confiance profond envers certains juges, citant des allégations de corruption et de malversations passées.
Ce différend foncier a des racines profondes, remontant à 2014 lorsque le groupe de citoyens a affirmé avoir acquis les terres auprès de M. Gérald Joseph. Les paysans, qui cultivent ces terres depuis 1937, ont contesté cette transaction, déclenchant une bataille juridique acharnée.
Au niveau du parquet de Fort-Liberté, les paysans avaient été initialement accusés de destruction, dévastation, incendie volontaire et association de malfaiteurs. Bien que des arrestations aient eu lieu, des vices de procédure ont conduit à la libération des accusés. Une ordonnance de la juge Margarette Georges Toussaint, datée du 20 novembre 2023, a renvoyé environ 30 personnes devant le tribunal criminel sans assistance de jury, une décision que les paysans ont contestée en appel.
Selon Me Mompremier, plusieurs des juges actuellement en poste à la cour d'appel du Cap-Haïtien étaient auparavant magistrats au tribunal de première instance de Fort-Liberté et étaient impliqués dans des actes de corruption et de malversations dans cette affaire. Il est rappelé qu'en 2014, ces mêmes juges auraient ordonné l'expulsion brutale, l'humiliation et le déplacement d'environ 300 paysans, qui occupaient paisiblement une portion de terres coloniales depuis 1937. Ces terres avaient été mises à disposition par le président haïtien Sténio Vincent pour accueillir des ressortissants haïtiens déportés ou massacrés en République dominicaine sous le régime de Rafael Leónidas Trujillo.
La Cour de cassation est désormais saisie de la question de la recevabilité de la récusation. Si elle est jugée recevable, une autre cour d'appel devra être désignée pour statuer sur l'affaire. L'incertitude plane donc sur l'avenir de ce dossier, alors que les paysans craignent de ne pas obtenir justice dans un système qu'ils perçoivent comme biaisé.
Dans une interview exclusive accordée à le journal ExplosionInfo Me Mompremier a révélé avoir informé le président de la cour d'appel, Garry Paul Angrand, du manque de confiance des paysans envers certains juges. Il a souligné que cette méfiance était alimentée par des expériences passées et des soupçons légitimes quant à l'impartialité de certains magistrats.
Malgré les tensions, l'avocat a appelé les paysans au calme, les encourageant à poursuivre leurs activités agricoles, essentielles à leur subsistance. Il a insisté sur le fait que la terre qu'ils cultivent représente non seulement leur moyen de subsistance, mais aussi un héritage transmis de génération en génération.
"Cette fois-ci, la justice doit triompher dans ce dossier", a-t-il conclu avec détermination. Il a exprimé l'espoir que la Cour de cassation prendra en compte les préoccupations légitimes des paysans et garantira un procès équitable, où leurs droits seront pleinement respectés. L'affaire de Prévoyance est devenue un symbole des luttes foncières en Haïti, où les enjeux de propriété et de justice sociale sont inextricablement liés.
Dans le cadre du litige foncier opposant des paysans de Prévoyance (Savane-au-Lait) à un groupe d’individus affirmant avoir acquis légalement des terres rurales en 2014, Me Rithodel Cadet, avocat de ces derniers, s’est exprimé dans une interview accordée au journal *ExplosionInfo*. Il a fermement rejeté la légitimité d’une récusation collective de la cour d’appel du Cap-Haïtien, initiée par les avocats des paysans.
« On peut récuser un juge dans un dossier, mais on ne peut pas récuser l’ensemble du tribunal », a-t-il rappelé, soulignant que la loi encadre de manière rigoureuse les procédures en matière de récusation judiciaire. Selon lui, chaque tribunal est souverain dans le traitement des affaires relevant de sa compétence.
Me Cadet précise qu’une demande d’écartement global d’une cour ne peut être instruite que par la Cour de cassation, seule habilitée à reconstituer une juridiction en pareil cas. À défaut de suivre ces règles, les paysans s’exposent à une forclusion, pouvant entraîner l’irrecevabilité pure et simple de leur démarche.
L’avocat a également rappelé que la cour d’appel du Cap-Haïtien avait déjà statué sur le fond de l’affaire, estimant que les juges avaient analysé de manière sérieuse les revendications paysannes, ainsi que les faits allégués concernant les actes collectifs dénoncés.
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