TRISTE MONDE... LE RÈGNE DU MENSONGE ET DES COLS BLANCS
Par Me Ludwig PIERRE, av.
I. Le Monde à l’Envers
Triste monde…
Où l’honnête est blessé, humilié, effacé, tandis que le traître est applaudi, célébré, décoré comme un héros. Le menteur devient référence, le manipulateur devient modèle, et celui qui ose dire la vérité… devient l’ennemi public. Ce n’est pas la vie qui sépare les hommes, mais la méchanceté qui s’incruste, l’hypocrisie qui s’étend comme un cancer, la trahison devenue mode de survie, l’égoïsme transformé en mérite, et l’absence de respect devenue habitude.
Le mensonge est roi. Il siège sur un trône de ruse et de peur. L’assassin pavane dans les rues, le criminel fait la loi, et la justice chancelle, fatiguée de crier dans le vide. La victime, elle, dort dans le tiroir des oubliettes, classée, étouffée, rayée du souvenir collectif.
II. La Décadence Morale
L’ingratitude danse sur les tombes, la lâcheté se couvre de beaux discours, et la morale a déserté les consciences. Les cœurs purs sont devenus suspects, et les consciences droites, des anomalies sociales. Les justes sont ridiculisés, les sages sont ignorés, et les fous dominent les nations. Les héros d’hier sont devenus les coupables d’aujourd’hui, et les coupable
s d’hier se pavanent comme des saints.
III. Les Dignitaires à Col Blanc
Et voici les dignitaires à col blanc, ces visages luisants de respectabilité, ces criminels polis qui saluent en public et poignardent en silence. Ils signent des crimes avec des stylos dorés, ils assassinent par décrets, par décisions, par complicités feutrées.
De véritables malfaiteurs en costume, véreux jusqu’à l’âme, maîtres dans l’art de mentir avec élégance. Ils crachent leur venin sur les hommes en sapattes, ces fils de la poussière, ces battants du quotidien, ceux qui se lèvent avant l’aube pour nourrir un foyer, ceux qui n’ont ni titre, ni fortune, ni défense.
Ils les méprisent du haut de leurs bureaux climatisés, tout en se prétendant serviteurs du peuple. Mais c’est le sang de ces hommes en sapattes qui arrose les racines de la nation. C’est leur sueur qui bâtit les cités, et c’est leur silence que les puissants exploitent.
Le sang coule, invisible mais vivant, en perpétuelle mutation, en évolution continue. Il crie vengeance dans les consciences, et un jour, il parlera.
IV. Les Robes Noires et Autres...
Et même parmi les robes noires, symbole du serment, la vérité chancelle. La justice n’a plus de colonne vertébrale : certaines robes se vendent, d’autres se taisent, et quelques-unes trahissent ce qu’elles devraient défendre.
Autrefois signe d’honneur, la robe est devenue, chez certains, un vêtement d’intérêt. Elle protège l’injustice qu’elle devait juger, elle cache les fautes qu’elle devait punir, et parfois, elle s’incline devant la richesse au lieu de la loi.
Les robes noires et autres - magistrats, avocats, docteurs, prêtres, professeurs - beaucoup se sont faits complices par confort ou ambition. Ils ont oublié que servir, c’est souffrir pour le vrai. Ils ont troqué la toge de la vertu contre le manteau du privilège. Leur silence pèse autant que le crime.
V. Les Faux Intellectuels
Et que dire des soi-disant intellectuels de la cité ? Autrefois porteurs de lumière, aujourd’hui courtisans de l’ombre. Ils se portent garants des crimes des puissants, ils signent des manifestes d’hypocrisie, et se cachent derrière leurs titres, leurs diplômes, leur robe qu’ils croient royale.
Ils ne servent plus la vérité, mais l’ordre établi. Ils n’éclairent plus le peuple, ils l’endorment. Certains, affamés de prestige ou rongés par la misère, se laissent acheter par un sourire, une promesse, une enveloppe. Ils deviennent les porte-voix d’un système qui les méprise, et publient des mots manipulés qu’ils croient sincères. Quelle ironie ! L’intellectuel devient l’instrument du pouvoir, le savant devient complice du crime, et le peuple, manipulé, croit encore à leurs discours creux.
Pendant ce temps, les vrais penseurs tombent. Les hommes libres meurent assassinés ou croupissent en prison, victimes de leur lucidité. Leur crime ? Avoir parlé, avoir refusé, avoir dénoncé. Leur sang nourrit la terre de l’avenir, mais la cité, aveuglée, continue sa mascarade.
VI. Le Temps des Masques
Triste monde… Où l’apparence a remplacé la vérité, où le paraître vaut plus que l’être, où la dignité se monnaie et la conscience se loue. Les dignitaires corrompus se font passer pour patriotes, les manipulateurs pour héros, et les oppresseurs pour sauveurs. Mais tout pouvoir bâti sur le mensonge est une tour de sable. Tout trône fondé sur la trahison finit par s’effondrer. Car tôt ou tard, le masque tombe. Et quand il tombera, on verra les visages hideux de ceux qui gouvernaient par le mensonge, les mains souillées de ceux qui signaient des crimes en costume, les cœurs pourris de ceux qui se disaient moralistes.
VII. Le Retour de la Vérité
Et alors, la vérité se lèvera, nue mais invincible. Elle parlera au nom des humiliés, des oubliés, des assassinés, des emprisonnés. Et ce jour-là, le mensonge tremblera, les faux dieux s’effondreront, et les consciences retrouveront leur voix.
Car le monde, même tordu, ne peut étouffer la justice éternellement. La lumière reviendra. Et les mots des vrais justes, ceux qu’on a fait taire, deviendront les armes de la génération qui viendra.
Me Ludwig PIERRE, av.
Ouanaminthe, Haïti, 22 Octobre 2025
« Quand le silence des bons devient plus coupable que les crimes des méchants, alors la parole devient un devoir sacré. »

